« C’est ce qu’on appelle un marronnier… »
Chaque année, la direction d’Ineo renégocie le calendrier de modulation avec les syndicats. Dans cette entreprise qui intervient sur les réseaux d’eau, de gaz et d’électricité, les salariés travaillent sur des horaires différents suivant la période de l’année : 35 heures par semaine en période basse et 39 heures par semaine en période haute, avec quatre heures de modulation par semaine qui ouvrent droit à récupération ou au paiement d’heures supplémentaires à la fin de l’année.
L’avis des salarié·es avant tout
Avant de négocier avec la direction, le syndicat s’est rapproché des salarié·es pour recueillir leur avis.
« Plutôt que simplement étudier les retours d’une enquête, on a décidé d’aller discuter avec les salarié·es et de l’écrire avec eux » indique Thomas Lucking, secrétaire général du syndicat CGT Ineo réseaux Nouvelle-Aquitaine.
« Après plusieurs réunions qu’on a eues sur Agen et Bergerac, on s’est rendu compte que les salarié·es ne voulaient pas qu’on touche à leur calendrier, qu’ils avaient depuis plusieurs années. »
La direction avait cependant une autre idée en tête
« Ils comptaient modifier nos horaires d’embauche, pour commencer et finir une demi-heure plus tard, et modifier nos temps de congés payés pour fermer l’entreprise quinze jours en août » déplore Thomas Lucking. Après plus d’un mois de discussions infructueuses, la direction a décidé d’appliquer ces horaires de manière unilatérale à partir du 8 janvier 2024.
« On a échangé quelques mails avec le délégué syndical pendant les fêtes de fin d’année pour se dire que les salarié·es étaient prêt·es à aller plus loin, et la majorité d’entre elles et eux étaient en débrayage le 8 » raconte Thomas.
Un mouvement suivi dès le départ
Dès le premier jour, coup de pression de la direction :
« Le grand directeur délégué était présent le jour du débrayage. Il s’est permis de sortir tous les employé·es grévistes et non grévistes devant le portail de l’entreprise, et il a fait l’appel comme à l’école… Quelques salariés ont pris peur et sont revenus sur leur décision, mais la majorité a tenu bon. »
À Bergerac, près de 96 % des salariés de la production étaient en grève. À Agen, où les travailleurs défendaient les mêmes revendications, le mouvement rassemblait tous les salariés de la production.
« Le grand directeur étant à Bergerac, ils ont subi un peu moins de pression là-bas. On leur a dit que la musique était trop forte, mais elle est restée forte » s’amuse Thomas.
Pendant le mouvement, les salarié·es ont pu compter sur le soutien de leur UD et de leur UL : « C’est eux qui nous ont prêté la tonnelle, le secrétaire de l’UL est venu nous voir, et on a même reçu la visite des retraités de l’UL. »
Pendant la grève, les négociations se sont poursuivies.
« La direction a un peu revu sa copie. Elle a maintenu la modification sur les horaires et les congés imposés, mais elle a proposé neuf mois en modulation haute et trois mois en modulation basse, contre respectivement huit et quatre actuellement. La totalité des salariés étaient contre la proposition, mais ils ont décidé : “Comme la direction a fait un pas, on va en faire un aussi.” »
Le deuxième jour, le syndicat a donc fait part de la contre-proposition des salariés à la direction : d’accord pour mettre en place les nouveaux horaires, mais pas question d’imposer la période de congés payés, et une répartition de dix mois en modulation haute et deux en modulation basse.
La revendication des congés a été entendue : malgré le maintien de la fermeture du site fin août, les salarié·es pourront poser leurs congés payés quand ils le souhaitent.
En revanche, la nouvelle modification de période ne convenait pas à la direction : la fermeture de fin d’année tombant en période basse, elle souhaitait que les salarié·es rattrapent ces semaines en période haute – deux jours de grève supplémentaires lui ont finalement fait retirer cette exigence.
La victoire au bout de la lutte
Un accord finalement trouvé, les salarié·es de Bergerac et d’Agen ont voté la fin de la grève le jeudi 11 janvier.
En plus de ces dispositions applicables aux deux centres de chantier, le site d’Agen a également obtenu gain de cause concernant la vétusté de leurs locaux et la mise en place d’une base de vie pour manger le midi.
« Sur le papier, mais on reste vigilants sur l’application par l’employeur » précise Thomas.
Par leur lutte, les salarié·es ont finalement pu peser sur la décision de la direction, qui était pourtant arc-boutée sur son point de vue depuis des semaines.
Preuve s’il en est qu’unis et organisés avec la CGT, les travailleurs peuvent faire basculer le rapport de force et faire valoir leurs positions.
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