Pour la première fois, en 2024, la température terrestre moyenne a dépassé de 1,5 °C celle de la période préindustrielle
L’endiguement du réchauffement planétaire, avec un seuil de 1,5 °C à ne pas dépasser, était pourtant l’objectif prioritaire de l’accord issu de la COP de Paris en 2015. Les politiques gouvernementales et patronales nous amènent sur la trajectoire opposée.
Pas d’emploi sur une terre inhabitable
Chaque semaine, nous constatons en France, mais aussi dans le monde, les effets dévastateurs du dérèglement climatique, que ce soit sur l’environnement, la biodiversité, l’économie ou les humain·es que nous sommes. Les records de températures tombent inlassablement les uns après les autres, les épisodes climatiques extrêmes se succèdent, générant incendies, inondations, etc. et pendant ce temps, les mesures d’atténuation et d’adaptation ne sont pas à la hauteur.
En particulier, les dérèglements climatiques amplifient les risques sanitaires auxquels sont confronté·es les travailleurs et travailleuses, particulièrement les plus précaires, exposé·es de manière disproportionnée à ces dangers.
« Chaque année, des milliards de travailleurs sont exposés à des dangers exacerbés par le changement climatique, et leur nombre ne fera probablement qu’augmenter. De solides données factuelles démontrent que de nombreux problèmes de santé touchant les travailleurs sont liés au changement climatique (cancers, maladies cardiovasculaires, maladies respiratoires, insuffisance rénale, troubles de la reproduction et problèmes de santé mentale, entre autres). »
Citation du rapport « Assurer la sécurité et la santé au travail à l’heure du changement climatique : L’Organisation internationale du travail » (OIT, 2024)
Il n’y a pas de fatalité face à l’inaction des gouvernements et du patronat
Ce que nous ne mettons pas en place aujourd’hui sous prétexte de déficit public, de libre concurrence, de soumission aux marchés ou de non-taxation des plus riches, l’ensemble de la population en pâtit dès maintenant. Et si rien n’est fait, la situation ne cessera de s’aggraver.
La CGT est engagée de longue date dans les processus des COP au sein de la Confédération syndicale internationale (CSI). Partout dans le monde, le syndicalisme appelle les pays négociateurs à prendre à Belém une décision qui améliore de manière tangible la vie et les moyens de subsistance de millions de personnes, en fixant une nouvelle orientation pour la coopération climatique : une orientation qui place les personnes et leurs droits au centre.
4 blocs revendicatifs
1 – Garantir la participation des syndicats et des travailleurs pour renforcer la démocratie
Dans le cadre des COP, le mouvement syndical international au sein de la CSI se bat depuis des décennies pour la mise en place d’un nouveau mécanisme multilatéral de transition juste permettant d’orienter l’ensemble du système international vers des transitions centrées sur l’humain·e aux niveaux local et national, où les travailleur·ses et les communautés contrôlent les décisions qui affectent leur vie et leurs moyens de subsistance.
En France, la CGT revendique notamment :
- l’instauration d’un réel pouvoir d’intervention pouvant aller jusqu’au veto pour les représentant·es des salarié·es dans les comités sociaux et économiques (CSE) et les organisations syndicales, notamment lorsque les projets des entreprises ont un impact négatif sur l’emploi ou l’environnement ;
- le renforcement du rôle des organisations syndicales, des instances de dialogue social et notamment des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (Ceser) en les consultant systématiquement, en prenant en compte leurs recommandations spécifiques dans la prospective, l’élaboration et l’évaluation des politiques publiques à tous les échelons des territoires ;
- l’examen obligatoire des projets alternatifs portés par les salarié·es et leurs syndicats, avec un soutien technique et financier sur les fonds de l’entreprise, de la société, du groupe, de la branche, de la filière, ou à défaut sur des fonds publics.
Anticiper le changement plutôt que de réagir aux crises
Partout dans le monde, les syndicats constatent la mise en place de politiques climatiques et énergétiques néolibérales, modelées par la privatisation et la marchandisation. Cette orientation dominante, loin d’anticiper les conséquences du changement climatique, les amplifie en nourrissant la précarité et les destructions d’emplois. C’est pour cela que la CSI revendique au sein des COP la mise en place de normes contraignantes, intégrées dans la feuille de route de chaque pays. Ces normes doivent garantir que les transitions créent un travail décent, s’attaquent aux inégalités et disposent des moyens nécessaires à leur mise en œuvre.
En France, la CGT revendique notamment :
- un moratoire sur les licenciements, pour préserver emplois et compétences, qui pourrait par exemple prendre la forme de contrats de sécurisation, à l’image de celui des travailleur·ses de la centrale de Gardanne. Il faut limiter strictement la définition légale du licenciement économique aux difficultés économiques graves mettant en cause la survie de l’entreprise ;
- la création d’un fonds mutualisé pour les transitions environnementales et économiques au niveau de chaque branche professionnelle, financé par une contribution assise sur la masse salariale des entreprises de taille intermédiaire (ETI) et des grandes entreprises. Le maintien du contrat de travail serait obligatoire, avec une obligation de reclassement au niveau des entreprises de la branche et du territoire, et/ou l’accès à une formation qualifiante pendant au moins vingt-quatre mois ;
- un cadre strict de conditionnalité des aides publiques versées aux entreprises, fondé sur des critères économiques (emplois de qualité en territoire), sociaux et environnementaux. Les aides publiques (subventions, crédits d’impôt, garanties, foncier, commande publique…) doivent être conditionnées à des engagements précis en termes d’emplois.
L’adaptation, une nécessité vitale pour le monde du travail
Pour pallier les conséquences déjà bien visibles du changement climatique sur les conditions de travail, la CSI revendique lors des COP la mise en place, en lien avec l’Organisation internationale du travail, d’un ensemble complet d’indicateurs à finalité politique, incluant les impacts du changement climatique sur les travailleur·ses, leurs emplois et leurs moyens de subsistance. Les politiques nationales d’adaptation doivent être élaborées en tenant compte de ces indicateurs, en associant les syndicats.
En France, la CGT revendique notamment :
- le retour des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), avec l’ajout d’une compétence environnementale (CHSCTE), qui devraient être renforcés par la création d’un droit d’alerte environnemental du CSE, l’intégration des effets climatiques dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) et la prise en compte dans chaque entreprise des fortes chaleurs notamment comme facteur de risque professionnel ;
- un plan ambitieux pour la santé au travail face aux impacts climatiques : création d’un fonds de prévention des risques climatiques en entreprise, reconnaissance des maladies liées au climat comme maladies professionnelles, embauche de médecins du travail…
- un renforcement des emplois et des formations pour l’adaptation : développement des métiers de la rénovation énergétique, du bâtiment bas carbone, du reboisement et de la gestion de l’eau, etc. avec des formations qualifiantes accessibles et revalorisées.
Du Nord au Sud, de l’argent il y en a, dans les poches du patronat
Une récente Conférence de l’ONU sur le financement du développement a démontré que le déficit du financement climatique atteignait 4 000 milliards de dollars par an. Ce déficit est particulièrement marqué pour les pays en développement, qui exigent que les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris de 2015 soient respectés : il faut que les pays riches et historiquement responsables du réchauffement climatique contribuent à la hauteur de leurs moyens.
La CSI revendique lors des COP un financement public nouveau, additionnel, sous forme de dons, en adéquation avec les besoins des populations et qui ne génère pas de dette. Mais ce qui est vrai du Nord au Sud l’est aussi au sein de chaque pays : c’est sur les grandes entreprises et les milliardaires que doit reposer l’effort de financement, pas sur le monde du travail !
En France, la CGT revendique notamment :
- le respect de ses engagements financiers vis-à-vis des pays en développement par la France, qui en 2021 promettait d’atteindre 0,7 % du PIB. C’est l’inverse que l’on observe dans le projet de budget actuel, qui prévoit une baisse de 19 % de l’aide publique au développement (– 704 millions d’euros), dans la continuité d’une diminution importante déjà appliquée l’an dernier ;
- une réforme juste, globale et cohérente de la fiscalité : baisser le taux normal de TVA et la supprimer sur les produits de première nécessité, renforcer et rendre plus progressif l’impôt sur le revenu et sur le patrimoine, rétablir un véritable impôt de solidarité sur la fortune et affecter les moyens nécessaires à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale qui atteignent 100 milliards d’euros par an ;
- la création d’un Pôle public financier à même de porter l’intérêt général. Refondre les missions de la Banque publique d’investissement et créer des synergies avec la Banque de France, la Banque des territoires, la Banque postale, la Caisse des dépôts et consignations, la CNP Assurance (Caisse nationale de prévoyance), l’Agence des participations de l’État ;
- une taxation européenne spécifique sur les Gafam et les multinationales du numérique, pour compenser l’optimisation fiscale et la concurrence déloyale qu’elles imposent aux services publics et aux entreprises nationales ;
- une meilleure taxation des activités financières, en élargissant la taxe sur les transactions à l’ensemble des produits spéculatifs (dérivés, gré-à-gré, haute fréquence) et en instaurant une surtaxe sur les rachats d’actions.